Pics de pollution : quelles sont les mesures possibles ?

Alors que les seuils d’alerte à la pollution ont été dépassés dans plusieurs agglomérations françaises dont Paris, comment peuvent réagir les pouvoirs publics ?
En Basse-Normandie, le conseil général en a appelé aux préfets, le 29 mars, afin qu’ils interviennent suite au nouvel épisode de pollution aux particules fines que connaît la région depuis plusieurs jours. Le seuil d’alerte de 80 microgrammes par mètre cube d’air pour les PM10 a en effet été dépassé dans le Calvados et la Manche, avec des pics à plus de 110 µg à Cherbourg. La France est d’ailleurs sous le coup d’un contentieux communautaire pour dépassement des valeurs-limites autorisées pour les PM10.
« Il faut différencier la pollution chronique au quotidien et les épisodes de pointe liés aux conditions météo. Dans ce dernier cas, ce sont les préfets qui doivent intervenir », explique Arthur De Pas, ingénieur à Airparif.
C’est pourquoi les élus bas-normands de la majorité PS-EELV-PRG ont voté une motion dans ce sens (l’UMP et le Nouveau Centre n’ont pas pris part au vote selon EELV). « Alors que la préfecture de Paris a annoncé son intention de prendre des mesures visant à limiter la vitesse autorisée des automobiles, combien de jours en alerte rouge faudra-t-il au préfet du Calvados pour réagir ? », a lancé l’adjoint EELV au maire de Caen, Rudy L’Orphelin.
Une procédure d’alerte rouge a été déclenchée le 24 mars dans le Calvados et le 25 mars dans la Manche. Mais le préfet du Calvados Didier Lallement a ajouté, le 29 mars, « qu’à ce stade, il n’est pas apparu nécessaire à Caen, comme d’ailleurs dans les autres villes de l’ouest de la France, de prendre des mesures contraignantes en matière de circulation automobile, notamment pour réduire les vitesses-limites ».
A Paris, la situation n’est guère meilleure. « Dans un communiqué toujours identique, le préfet de police recommande aux automobilistes de veiller à essayer de réduire leur vitesse si c’est possible, et aux enfants et aux personnes âgées de privilégier les activités calmes et d’éviter l’activité physique », souligne la mairie de Paris.
Concrètement, quelles mesures est-il possible de prendre ?
« Il est nécessaire de dépasser les mesures d’urgence et de s’attaquer aux pollutions chroniques, qui ont touché en 2011, dans la seule région francilienne, 3,1 millions de personnes pour la pollution au dioxyde d’azote (NO2) et 2,7 millions de personnes pour les particules PM10 » recommande Arthur De Pas.
En théorie, les plans de protection de l’atmosphère (PPA) peuvent y répondre. Ils fixent en effet « des mesures préventives et correctives, temporaires et permanentes, pour éviter le dépassement des seuils d’alerte ». Pris par les préfets, ces plans peuvent agir sur le fonctionnement et l’exploitation de certaines catégories d’installations, la fréquence du contrôle de leurs émissions, l’usage de carburants et de combustibles, l’utilisation des véhicules, ou encore sur l’élargissement des substances sous surveillance (article L222-5 du Code de l’environnement).
Notons qu’en Ile-de-France, le dernier PPA (2005-2010) s’est arrêté depuis plus d’un an. Sa révision, actuellement au stade de la concertation réglementaire, n’interviendra pas avant la fin de l’année 2012.
Plus largement, un préfet peut en cas d’urgence prononcer « la restriction ou la suspension des activités concourant aux pointes de pollution, y compris la circulation des véhicules, et la réduction des émissions des sources fixes et mobiles » (article L223-1 du Code de l’environnement).
Quant aux zones d’action prioritaire pour l’air (Zapa), elles permettront d’interdire ou de restreindre la circulation aux véhicules les polluants, sur le mode du volontariat et de l’expérimentation, pour les collectivités de plus de 100.000 habitants. Seules 8 agglomérations candidates devraient déposer un dossier d’ici juillet 2012.
Des actions à la source s’avèrent nécessaires. Denis Baupin, maire adjoint de Paris (EELV), souligne l’importance du diesel dans le parc automobile (60% aujourd’hui contre 25% en 1995). Ces moteurs génèrent moins de CO2 au kilomètre mais émettent du dioxyde d’azote (NO2), responsable de maladies respiratoires et cardio-vasculaires. Michel Dubromel, de France Nature Environnement, demande d’ailleurs que les véhicules diesel les plus nocifs soient visés par les futures expérimentations Zapa.
Autres pistes lancées par la mairie de Paris : obliger les poids lourds en transit à contourner la métropole ou réduire la vitesse de 20 km/h sur les grands axes dès que les seuils sont dépassés. Certaines villes européennes, comme Londres, Berlin ou Stockholm, ont même restreint la circulation à certaines zones.
Selon une étude menée par Airparif sur les émissions de particules PM2,5 dans la région parisienne, entre 2010 et 2011, le trafic automobile n’est pas le seul responsable des pics de pollution. Si 45% des émissions proviennent du trafic routier (dont la moitié des véhicules roulant au gazole), 15% font partie de l’ambiance de l’agglomération et 40% sont importées d’autres régions, voire d’autres pays. Ces dernières concernent les activités industrielles et agricoles.

Le 30 mars 2012 par Stéphanie Senet

source : Journal Environnement


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